Sans doute est-ce la nuit ainsi sans doute
Sans doute est-ce la nuit ainsi sans doute faut-il nuit appeler ce qui surgit de la ténèbre
Du rire des Titans montent les vents nocturnes aux ailes éclaircies
Sans doute est-ce le premier jour du monde et du premier regard
Du plus loin que la nuit songent Aldébaran Deneb et les Pléiades en essaim affolé
Chaque étoile est un clou irradiant sa corolle
Chaque étoile se tait juste au bord de l’abîme
Chaque étoile inaugure un monde finissant et harcèle le vide d’innombrables piqûres
L’aube frôlée n’en finit pas d’aimer le bleu profond d’où naissent les étoiles
L’alliance se noue sitôt de mémoire éperdue
Epiphanies soudainement surgies dont ne sait où
Montent les brises par dessus les rêves des hommes et de leurs femmes
Le bleu l’emporte doucement dans la vive inquiétude des mésanges
C’est l’été on ne sait ou la fin du printemps
Un ruisseau s’attarde refluant vers la source
Des arbres aux feuilles blanches peuplent d’émoi les lents nuages indociles
C’est bien l’été à la façon des orangers
Le jour exulte de moissons partagées
L’eau qui court sous la brume annonce dans son ciel les océans des origines
Et cependant déjà
De terre nue s’ouvre le chant de muette amertume
Nuit sans souffle sans source et sans répit
Nuit écarlate
L’ ombre avec l’aridité pour seul écho
Le sable brûle sous le pied la pente est rude le désert intérieur s’étend à perte d’heures
Et déjà le silence est semblable à la mort
Mille aiguilles de sel savent blesser la chair
L’esprit meurtrit le cœur la face contre terre
Le ravin de la peur crible de ses morsures les précipices insatisfaits
L’heure venue on passe à gué dans l’orbe des fleuves indécis
Au matin les vallées s’étonnent d’être encore de ce monde si las
Ecce homo dans les ténèbres en plein midi
JBD